Ce bâtiment a été construit vers 1781 pour une anglaise, Lady Pénélope Atkins, épouse de George Pitt Lord Rivers, Pair d'Angleterre. À la Révolution, l'Armée française occupe le comté de Nice et la Villa, déclarée "bien d'émigré", est nationalisée.
En 1800, elle est mise en vente et acquise par un niçois, Sébastien Grandis : on la connaîtra alors sous le nom de "Villa Grandis". Sous l'empire, la Villa est habitée à deux reprises par Pauline Borghese, sœur de l'Empereur Napoléon et veuve du Général Leclerc. Ses deux passages à Nice se situent en 1807 et 1813. En 1809, la Villa sert de résidence surveillée à la Princesse Marie-Louise, fille du Roi Charles IV d'Espagne. Par la suite, elle appartient successivement à deux riches niçois : Monsieur Guiglia puis le banquier Carlone qui la lèguera à la ville de Nice.
Elle est rachetée en 1882 par Madame Furtado-Heine, veuve du banquier hambourgeois Charles Heine, qui en fait don en 1895 au Ministère de la Guerre à l'usage des Officiers ayant besoin de repos. À l'époque, la France était en campagne à Madagascar.
Le 18 novembre 1895, afin de perpétuer la mémoire de Madame Furtado-Heine et de ses bienfaits, la République française décide par décret que cette donation prendrait et conserverait le nom de "Fondation Furtado-Heine - Villa des Officiers".
Restaurée, la Villa est aujourd'hui classée et constitue désormais un lieu de villégiature privilégié, idéalement situé pour profiter de la Côte d'Azur et de ses atouts.
L’année 1896 a vu disparaître une femme de bien qu’on avait eu raison d’appeler : la grande bienfaitrice. Son nom était devenu synonyme de charité.
On sait, en effet, avec quelle intelligente générosité Mme Furtado-Heine continuait les nobles traditions qu’elle avait recueillies dans la famille de son père.
Lorsque, au mois de juillet 1887, le Journal Officiel annonçait sa nomination dans l’Ordre National de la Légion d’honneur, il appréciait ainsi ses œuvres.
« Mme Furtado-Heine s’est signalée par des œuvres charitables de la plus haute importance ; a notamment fondé à Paris un dispensaire modèle, où chaque année des milliers d’enfants malades sont recueillis et soignés gratuitement ; a également fait preuve de dévouement pendant la guerre de 1870-1871, en organisant une ambulance à Paris et venant au secours de nos soldats internés ou prisonniers. »
Mme Furtado-Heine ne voulut jamais revenir en Allemagne, notamment à Hambourg, où elle possédait pourtant une magnifique propriété.
On se souvient qu’elle reçut, au mois de juin 1896, les insignes d’officier de la Légion d’honneur, à l’inauguration d’une crèche fondée par elle au Petit-Montrouge, et le ministre, chargé de lui remettre cette juste récompense, rappelait, en termes émus, la sollicitude qu’elle n’avait cessé de témoigner aux déshérités, ajoutant qu’il était particulièrement heureux d’apporter le témoignage de la reconnaissance du gouvernement à une femme dont l’existence tout entière avait été employée à faire le bien, de la façon la plus intelligente et avec le plus grand cœur. On aurait pu ajouter « avec la plus grande discrétion ». En effet, si elle donnait largement à ceux qui peuvent le moins demander, aux enfants, aux malades, aux aveugles, – pour lesquels elle a installé une école professionnelle – , Mme Furtado-Heine donnait en secret, et l’on n’a jamais su positivement ce que lui coûtaient ses donations. Elle avait constituée dans une forte proportion à l’établissement de l’Institut Pasteur, où son buste a été placé dans la galerie des souscripteurs qui ont créé la maison.
Au Croisic, elle a fait construire, sur le modèle de l’établissement de Berck-sur-Mer, un asile pour les enfants sans famille.
Pendant l’expédition de Madagascar, elle fit don au ministre de la guerre de sa somptueuse villa de Nice, destinée à recevoir les officiers convalescents ; elle lui assignait, en outre, un revenu annuel de 60 000 francs. Ayant appris que, par suite d’une organisation défectueuse, les officiers ne trouvaient pas au sanatorium de Nice les conditions d’existence qu’elle avait voulu assurer, elle augmenta aussitôt le montant de la subvention. Mme Furtado-Heine n’avait pas d’enfants ; elle avait adopté une de ses nièces, Mlle Furtado, qui épousa le général Ney, duc d’Elchingen ; de cette union sont nés deux fils, le prince de la Moskawa et le duc d’Elchingen, et trois filles, dont l’aînée est mariée au prince Joachim Murat. Devenue veuve, la duchesse d’Elchingen épousa, en secondes noces, le duc de Rivoli, ancien officier de la cavalerie. Mme Furtado-Heine vivait une grande partie de l’année dans son beau château de Rocquencourt, entre Versailles et Marly, se plaisant au milieu des fleurs qu’elle aimait à la passion. Peu de temps avant de mourir, elle avait réuni à sa table quelques amis avec son neveu M. Cardozo et le comte Fery d’Esclands. M. Gaston Calmette, qui était au nombre des convives, dit qu’elle semblait alors en parfaite santé, promettant à ses soixante-seize années de nombreux lendemains ; elle était heureuse, parce que sa fête, la Sainte-Cécile, approchait, que sa villa des officiers, à Nice, allait être enfin réorganisée selon ses vœux.
« Sa figure expressive avait ce jour-là encore toute sa force : ses yeux hésitants, incertains, avaient conservé, malgré la fatigue des hivers, le bon sourire des temps où ils avaient leur pleine clarté ; et tandis que son corps cloué par les douleurs, était mobilisé dans le fauteuil qu’on roulait de pièce en pièce, ses mains, qui avaient encore toute leur finesse et tout leur charme, fournissaient avec une remarquable agilité leur besogne coutumière d’ouvrages au crochet pour les pauvres, car les pauvres avaient, pour ainsi dire, son exclusive pensée.
Sa causerie n’avait jamais été plus attachante et plus nette. Elle nous rappela ses souvenirs sur le général Dupont que, jeune fille, elle connut chez sa mère Mme Elie Furtado, née Fould. Dupont lui racontait, avec des larmes dans la voix, le désespoir qui s’empara pour jamais de lui, à la suite de la capitulation de Baylen, quand il apprit que Vedel et Dufour, qu’il croyait hors de cause, avaient été compris, à son insu, dans sa défaite. Et mille détails curieux revenaient à sa mémoire sur les hommes et sur les choses de ces grandes époques disparues. »
Nous sommes heureux, quant à nous, de rendre un dernier hommage à la mémoire de cette femme de cœur, qui méritait bien les honneurs militaires qu’on lui a rendus, en sa qualité d’officier de la Légion d’honneur.
Villa des Officiers – Furtado Heine,
121 rue de France
06000 NICE
Tél : 04 93 37 51 00